vendredi 9 février 2024

Le 9 février, ROBERT BADINTER nous a quitté-e-s. 

L'homme politique, l'avocat, l'homme de droit, l'intellectuel, l'écrivain, le sage marquent, nourrissent et portent notre mémoire. Il est indissolublement lié à notre histoire comme défenseur des lesbiennes et des gays (grâce à lui, dépénalisation des homosexualités), comme militant et législateur des droits humains  (grâce à lui, abolition de la peine de mort).

"Condorcet, un intellectuel en politique", essai historique écrit avec son épouse Elisabeth Badinter, philosophe, m'aura passionnée de par son écriture vive et alerte et de par son érudition et la mise en exergue des engagements et des propositions politiques dont avait fait preuve l'homme du XVIIIème. J'avais été très émue en 2019 par le récit familial et autobiographique que Robert Badinter avait eu la généreuse idée de nous offrir avec "Idiss" (édition Librairie Arthème Fayard, Paris, 2018).

Qu'un hommage national lui soit rendu.

"Gisèle Halimi et Raymond Forni déposèrent une proposition de loi (loi n° 82-683 du 4 aout 1982 abrogeant le délit d'homosexualité), avec l'accord du gouvernement. [...] Contre ce texte symbolique, quelques députés conservateurs s'enflammèrent. On aurait cru, à les entendre, que nous souhaitions transformer Paris en un vaste Sodome et Gomorrhe. Je m'interrogeais in petto sur les sources profondes de ces dénonciations enflammées de l'homosexualité. Au Sénat, lorsque le texte vint en discussion, ce fut pire encore. Je revois un important parlementaire de droite à la tribune, si cramoisi d'indignation qu'on pouvait craindre pour lui un transport au cerveau. Je l'écoutai avec intérêt, car il avait du talent. Je l'imaginais sous les traits d'un des notables de la Chambre des pairs, sous la monarchie de Juillet, immortalisés par Daumier, avec le menton lourd entouré de favoris, enfoui dans un col très haut. Il était vain en tout cas, d'espérer convaincre la majorité sénatoriale du bien-fondé de la suppression du délit d'homosexualité. A croire qu'aucun homosexuel n'avait siégé au palais du Luxembourg ! Il fallut aller jusqu'au bout de la navette parlementaire. Trois fois le Sénat rejeta le texte sacrilège. Vingt-cinq ans plus tard, siégeant à mon tour dans la Haute Assemblée lors du débat sur le Pacs, j'eus plaisir à rappeler à la majorité sénatoriale son soutien de jadis à la répression de l'homosexualité." (extrait de "Les Epines et les Roses", édition Librairie Arthème Fayard, Paris, 2011).

Précédemment à ce passage, l'auteur Robert Badinter précise que l'article en cause n° 331.2 du Code pénal était tout droit issu d'une loi de Vichy qui avait créé le délit d'homosexualité.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Le 9 février, ROBERT BADINTER nous a quitté-e-s.  L'homme politique, l'avocat, l'homme de droit, l'intellectuel, l'écriv...